source foot365
26/03/08
Fondu de foot depuis toujours, Marc Lavoine voit un lien étroit entre les artistes et les footballeurs. Le chanteur-acteur fait un intéressant parallèle et nous livre son point de vue.
Marc Lavoine, quel est votre lien avec le football et la FFF ?
Le lien est très simple. J’ai fait du football pendant dix ans avant de faire du théâtre. Et le football est à peu près la même chose que le théâtre : c’est l’intelligence d’un collectif au service d’une œuvre, qu’elle soit écrite par le hasard des dieux du sport ou par Shakespeare. Nous avons des répliques à donner, une prestation à jouer, nous devons faire rêver les gens et en même temps atteindre notre but d’une manière collective. C’est une diffusion collective d’idées autour d’un projet, tous ensembles au même moment. C’est ce qu’il se passe au théâtre, au cinéma et aussi sur scène quand on fait des concerts. La passerelle est vraiment infime. D’ailleurs, les footballeurs sont des artistes pour la plupart.
A qui pensez-vous en particulier ?
Quand on voit des Valbuena, des Mandanda, des Benzema, toute cette jeune génération-là, on se rend bien compte que ce sont des gens qui auraient pu être artistes. C'est-à-dire que le langage de leur corps nous parle et nous raconte quelque chose, comme Noureev pouvait nous raconter des choses et nous faire rêver. Le lien est là, mais il résulte surtout au départ d’une pulsion humaine. Car le foot résout des problèmes.
En êtes-vous la preuve vivante ?
Moi, j’ai traîné autour des stades, j’avais des copains qui ont eux aussi tourné autour des stades, ça pouvait mal tourner mais le football nous a ramené sur des valeurs, des repères, des principes, avec une éthique, des dirigeants et des profs de sport. Tous des gens qui avaient des valeurs et nous ont donné une autre façon de voir les choses. Notamment en banlieue sud, d’où je viens, mais c’est bon pour toutes les banlieues de la Terre. Quand un ballon roule dans une rue, il y a autour des mômes qui vivent la même passion au même moment. C’est un exemple pour la société.
« Mandanda est une bonne nouvelle pour l’équipe de France »
On a pu voir avec l’exploit de Carquefou que le foot était toujours du rêve… Est-ce ça le plus beau à vos yeux ?
Oui, je suis très content de voir que la Coupe de France est toujours une vraie surprise, avec de vrais matchs. Le match de Lens il y a deux semaines (ndlr : au Mans) était également un match incroyable, à rebondissements. Il y a un esprit extraordinaire dans cette Coupe de France ! Mais j’aime aussi toutes les autres compétitions. Je suis triste que nous soyons définitivement partis des terrains européens. On va remettre ça l’année prochaine, car je pense que Lyon a un très bon groupe en devenir, comme Marseille. Marseille et Bordeaux font une saison extraordinaire et j’aime beaucoup Steve Mandanda. C’est une bonne nouvelle pour l’équipe de France.
Pensez-vous que Mandanda puisse bousculer l’ordre établi ?
Comme Raymond dit toujours, il suffit d’un rien pour que l’ordre change. Il suffit d’un choc, d’une gastro ou d’une phase un peu plus compliquée pour un joueur. Pour les attaquants par exemple, on sait bien que c’est important de marquer des buts. Le moral est lui aussi important, car ce sont des gens qui peuvent vite entrer en fragilité. On a vu le retour de Djibril Cissé il y a quelques mois alors que c’était quelqu’un qui était en difficultés il y a quelques mois. Le football n’est pas une science qui se tient sur le temps. Comme les acteurs, les joueurs ont une vie privée, un mental, et parfois c’est compliqué d’assumer des matchs et de les enchaîner. C’est difficile physiquement, mais aussi intellectuellement et moralement pour les joueurs. Raymond a eu raison d’élargir et de faire venir du sang neuf. Ça motive ceux qui sont déjà en place et ça donne une perspective à des jeunes comme Valbuena ou Mandanda. Et quand on a une perspective ou un contrat dans une maison de disques, on crée des chansons et on fait plus. Pour un sportif c’est la même chose : quand il a un projet, il y va. Et pour ces gens-là, c’est l’heure, le moment.
Mathieu Valbuena bénéficie-t-il d’un effet de mode ?
La mode c’est important. C’est bien d’être en pointe et d’être vu, repéré. Après, ce qu’il faut c’est tenir. C’est toujours le dilemme des acteurs, des metteurs en scène, des écrivains, des chanteurs et des footballeurs : s’inscrire dans la durée. C’est ce que fait Benzema par exemple, mais qui n’est pas évident. Un joueur comme Valbuena profite aussi d’une grande expérience, d’une expérience qui lui a donné le sens de l’humilité et du travail. On ne devient pas Valbuena ou Mandanda comme ça sur un effet de mode, et surtout on ne le reste pas. On reste là uniquement parce que l’on travaille et que l’on a une ligne très claire, qui nous dit de bien jouer. Car une carrière d’artiste ou de footballeur c’est court. Donc il faut jouer. On le voit à Marseille : il y a une rigueur mais aussi une humanité, un groupe. C'est-à-dire que le groupe marche bien ensemble. C’est la même chose à Bordeaux : Laurent Blanc c’est très sérieux, on sent que les joueurs s’amusent. Wendel est un super joueur, ça se sent. Comme on le sent chez un grand guitariste ou un grand musicien.
« Benzema a quelque chose de cinématographique »
Ça se voit tout de suite ?
Oui, moi je vois que ce sont des gens qui ont une sorte de magie, ils ont quelque chose de gracieux en eux.
Quel est le plus beau joueur aujourd’hui devant ? Benzema ?
Oui, Benzema c’est un personnage. En plus, il m’a envoyé son maillot, et je l’en remercie. Le geste devient beau quand on crée une esthétique du jeu. C’est ce qu’avait fait Zidane. Avant lui, personne n’avait joué comme Zidane. Et c’est vrai que Benzema a quelque chose d’énigmatique, de cinématographique. Et en même temps, pour avoir été de temps en temps à Lyon, je trouve que ce qui est précieux à Lyon c’est l’éducation et la pédagogie. A Lyon, il y a vraiment des gens qui s’occupent humainement de leurs jeunes. Ça se sent dans les résultats et dans le comportement aussi.
Allez-vous faire un nouveau disque par rapport à ça ?
Par rapport à ça, j’espère. Peut-être même plus que ça, on verra. J’avais commencé à prospecter des idées, mes copains et camarades sportifs et artistes m’avaient rejoint pour la vidéo de Douce France. On espère bien renouveler l’opération.
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Jeu 27 Mar - 23:07
